Un média, qu’il soit papier ou pure player, n’est pas l’autre. Ses thématiques, sa cible de lectorat ou d’“internetorat”, les principes-même que ses fondateurs ou sa direction veulent appliquer dicteront dans une certaine mesure ses choix de “modèle économique”. Abonnement, sponsoring, mécénat, publicité, subvention publique, fondation, financement participatif… sont autant de possibilités.
Mais chacune a ses avantages et inconvénients, ses aléas et ses implications.
Quelle formule choisir? Souvent, seule l’expérience permettra de le déterminer, en fonction du type de contenus du médias et de sa “cible”.
La question fut débattue lors de la “Journée de la Presse Indépendante” organisée en octobre 2019 par le Spiil, le Syndicat français de la Presse Indépendante d’Information en Ligne.
L’abonnement, une formule dépassée?
Abonnement. Ringard? Passéiste? Valeur sûre? Preuve d’adhésion et d’appréciation? Comme on va le voir, il n’y a pas de réponse définitive…
Il y a le pour : “L’abonnement crée un lien direct et fort avec sa communauté de lecteurs. L’abonnement est payé d’avance, ce qui est positif pour la trésorerie du média, surtout s’il est annuel. Il peut faire l’objet d’une reconduction tacite en toute transparence. Et sa récurrence en fait un outil de financement plus stable que la publicité”.
Et il y a la petite douche écossaise : “pour équilibrer un média en ligne, il faut 2.000 abonnés à 50 euros par an. Le financement d’un journaliste est à ce prix”.
Or, le “taux de conversion” (transformer un lecteur gratuit en abonné payant) n’est pas gras. En moyenne (sans que ce soit une règle ou un repère inamovible), seulement 5% des lecteurs prennent un abonnement payant. Autant dire que, pour nombre de pure players, du genre petit Poucet, le calcul est vite fait…
Comment “convertir”?
Parties d’articles réservées aux abonnés, synthèses gratuites, accès gratuit pendant quelques jours après publication avant basculement en mode payant (ou l’inverse!)… Les options sont nombreuses et ont toutes des avantages et des inconvénients.
Prenons l’option de l’accès gratuit à une information succincte en promettant aux lecteurs qu’ils en découvriront bien plus une fois abonnés.
“Avec une telle approche, on ne montre pas au lecteur ce à quoi il peut réellement s’attendre”, soulignait Edmond Espanel, directeur général du média en-ligne brief.me. “Dans ce cas de figure, le lecteur ne découvre qu’une partie de l’offre, à faible valeur ajoutée, du média. Ce qui n’est pas de nature à le séduire. Il va très vite estimer qu’il trouve la même chose ailleurs sur le web. La réelle qualité du média en ligne lui échappe.
C’est via une première expérience gratuite la plus complète possible du produit qu’il pourra se rendre compte de la qualité proposée et payer ensuite pour continuer à en bénéficier”.
“La presse de qualité, c’est comme les produits de luxe: on ne fait pas de soldes.”
Pour amener le lecteur gratuit à s’abonner, faut-il opter pour la carte de la promo temporaire sur le prix de l’abonnement?
“Deux écoles existent”, entendait-on lors de l’atelier du Spill. “Tout dépend de la perception de la valeur du travail des journalistes. Si cette perception de la valeur est faible, bradée par des actions de promotion, on ne va pas donner envie aux lecteurs de s’abonner. En réalité, la presse de qualité, c’est comme les produits de luxe: on ne fait pas de soldes”.
À méditer!
“Si la perception de la valeur du travail des journalistes est faible, bradée par des actions de promotion,
on ne va pas donner envie aux lecteurs de s’abonner.”
Chouchouter l’abonné
Un des autres enseignements de cet atelier du Spiil a mis en lumière la nécessaire démarche de marketing direct à mettre en place pour que la démarche commerciale sur constitue l’abonnement fonctionne.
Compter uniquement sur la notoriété du contenu pour amener à l’achat ne suffit pas. Il faut pouvoir “relancer” et suivre son (candidat-)abonné. Réagir rapidement quand il s’abonne, le remercier, personnaliser la relation qui se noue avec le lecteur. Un simple “accusé de réception” automatique ne suffit pas à créer un climat positif avec le lecteur, notait un participant à cet atelier.