L’usage inconsidéré de tweets dans les productions des journalistes et ses effets pervers


La presse, une nouvelle fois, se tire-t-elle une balle dans le pied ou creuse-t-elle sa propre tombe? La question a été posée – et n’a pas encore obtenu de réelle réponse – lorsque les médiats “traditionnels” sont passés à la parution en-ligne, ouvrant toutes grandes les portes d’accès, en publiant les contenus gratuitement. Depuis lors, l’exercice de rétropédalage ressemble à un parcours du combattant et à une chaîne sans fin d’essais et erreurs.

Aujourd’hui, l’autre balle que la presse – traditionnelle ou en-ligne – semble se tirer dans le pied est, selon certains observateurs, la place trop grande ou la manière dont les journalistes et éditorialistes insèrent… des tweets dans leurs propres productions.

La seule créance que puisse avoir un journaliste aux yeux du lecteur est d’apporter la preuve que ce qu’il écrit (ou produit sous une quelconque autre forme) est la réalité, a été vérifié, contre-vérifié, croisé, authentifié. Et l’une des manières de le faire est d’expliquer quelle est la source (sans pour autant mettre en danger cette source, dans certains cas bien spécifiques).

En invitant des tweets dans la boucle – avec toute l’incertitude de véracité ou de finalité qu’ils comportent souvent -, les journalistes risquent de mettre à mal leur crédibilité, celle de leur média et celle de la presse dans son ensemble. Sauf à démontrer que le tweet en question est véridique et fiable. Ce qui est rarement le but d’une insertion de tweet.

Il y a un autre danger, estiment les observateurs. En donnant aux auteurs de ces tweets et aux “plates-formes”, d’une manière générale, un champ d’exposition supplémentaire, historiquement connoté comme plus fiable et crédible, l’effet risque d’encourager tous ceux qui veulent faire passer des messages à se ruer encore davantage vers les réseaux sociaux, sachant que la presse mordra à l’hameçon… Et de donner encore plus d’autorité, de crédibilité et de puissance aux plates-formes.

Deux professeurs de journalisme américains (du Temple University’s Klein College of Media and Communication et de la Hussman School of Journalism and Media) ont effectué un travail de recherche sur ce phénomène, puisant dans les publications (Tiwtter et presse) de 2018. Résultat? Plus de 23.000 articles où des tweets étaient cités purement ou simplement ou paraphrasés. Sans autre forme de procès. Pire: souvent, le tweet était la seule source (d’inspiration) de l’article…

Parmi les conclusions – ou mises en garde – de ces deux professeurs: « Platforms already have amassed control of distribution, monetization, and audience measurement to such an extent that journalistic independence and accuracy are compromised by virtue of journalism’s reliance on this infrastructure. If in addition to this, Twitter exacerbates a journalistic tendency to pass along statements unverified, there are clear drawbacks for the information ecology. »

Source: NiemanLab.org. When journalists put tweets in news stories, do they transfer too much power to Twitter?



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